ou "C'est pas parce qu'on est pas mort qu'on est vivant", ou plus simplement : « Kill your idols ».
J'ai écrit il y a pas longtemps qu'on déteste toujours ce qui nous renvoie à ce qu'on a pu être. J'ai écrit aussi qu'on reste marqué à jamais par la musique qu'on écoute quand on quinze ans. J'ai écrit qu'un de mes plus gros chocs musicaux fut de recevoir OK Computer pour mes 15 ans.
Je ne vous ai jamais menti. Sur ce coup là. J'ai juste caché une partie de la vérité.
OK Computer n'était pas tout seul ce jour là. Il était accompagné de Showbiz de Muse et de Black Market Music de Placebo. Deux albums que j'ai tout autant révérés... à l'époque. Car le présent n'est pas toujours beau à voir. On devrait vivre le présent en oubliant tout du passé.
Placebo, Muse. Deux groupes que j'aurais forcément placés en tête de mes goûts si on me les avait demandé à l'époque. Deux groupes qui font partie de mes souvenirs douloureux aujourd'hui. Deux groupes qui se ressemblent plus qu'on veut bien le croire.
Muse d'abord : ils étaient jeunes, beau gosses, talentueux. Matthew Bellamy était et reste un multi instrumentiste de génie, qui a l'époque était capable de chanter des trucs d‘une naïveté et d'une simplicité émouvantes. Sur l'album Showbiz, on a tout ce qu'on peut espérer d'un groupe débutant, ballade calme et émouvante (Unintended), Hymnes en puissance (Sunburn, Muscle Museum, ou on se rend compte que la surenchère d'effets peut servir le morceau), et construction d'ambiances glauques et oppressantes (Showbiz)... Un album qui fait franchement du bien et laisse espérer en une nouvelle génération...de qualité.
Placebo, de son côté, en était déjà à son second album à ce moment là... Le premier était l'incarnation de l'adolescence, brut, plein de colère et de provocation... L'ensemble du groupe arborait un look androgyne et restait sexy en diable. Tout pour en faire un groupe risquant de secouer le monde la musique, bien calme tout de même à ce moment là. Le second album, Without you I'm nothing est plus posé, plus travaillé, plus mur, plus abouti en somme. Ca restera pour longtemps leur chef d'œuvre.
Le second album de Muse, lui, Origin of Symmetry, les fait passer un peu plus loin dans le domaine des expérimentations. Les nappes de clavier et les arrangements bordeliques de Space Dementia (entre autres) sont là pour le prouver. Les morceaux sont plus tortueux, plus fous, plus longs aussi, les paroles plus codées (on a l'impression d'assister à la crise mystique d'un ingénieur informaticien)... Mais l'album reste bon, tous s'accordent à le désigner comme leur meilleur, ceux qui aiment comme ceux qui n'aiment pas.
Puis vient l'année 2003. Les trois groupes qui firent leur apparition dans ma vie en 2000 sortent un album. Heureusement qu'Hail to the Thief en fait partie, sinon il y a de quoi décider de se crever les tympans.
Ces deux albums ont en commun d'être... disons vicieux. Pour quelqu'un qui se délecte par avance de l'écoute du nouvel album de ses groupes préférés, la première écoute est agréable. Mais arrive le second effet Kiss Cool : ces albums deviennent lassants à la 5 ème écoute, désagréable à la 10 ème, inaudible à la 20 ème.
Et ils ont la particularité d'avoir un troisième effet Kiss Cool : être les plus gros succès de vente de leurs auteurs, être les albums qui les feront connaître aux States, passer en rotation lourde sur MTV.
C'est foutu. On comprend alors ce qu'ont ressenti les premiers fans de la scène Grunge quand ce mouvement est devenu populaire.
Et réglons son compte à ce que vont dire tous les mauvais coucheurs... On les a pas trouvés mauvais du jour ou ils sont devenus connus, mais ils sont devenus connus du jours ou ils ont commencé à être mauvais. Entendons nous bien là-dessus.
Ces deux albums sont évidement Sleeping with Ghosts pour Placebo et Absolution pour Muse.

Muse décide de faire un album écolo - politico -S.F., commence à se prendre pour le Rachmaninov du XXI ème (influence revendiquée par Matthew Bellamy, mais qu'on cherche toujours, parce qu'au final on pense plus à Queen), récupère l'ingénieur du son de Tom Morello et fait faire ses pochettes par le gars qui s'est occupé decelle de Pink Floyd, rajoute partout des nappes de claviers, des cordes, se prend pour une cantatrice, remplit les stades, fait hurler les gamines de 13 ans qui ne savent pas qui sont Rachmaninov et Tom Morello.
Brian Molko se coupe les cheveux, perd la rebellitude (ah, si, quand même, il met du mascara, comme Greenday), fait un gosse, des concerts d'une heure (quand avant les concerts de Placebo duraient 2 h au bas mot), fait un duo avec Indochine, font hurler des gamines de 13 ans qui les ont découvert via Indochine, qu'elles prenaient pour une influence de Tokio Hotel.
- Eh, regardez, il y a une terre avec une lune dans le ciel... Concept, non?
- Ouah putain, trop fort!
Il suffit d'écouter Black Holes & Revelations, l'album politico - mystico - S.F. de Muse pour comprendre. Un groupe qu'on connaît depuis leur premier album, on a une tendresse particulière pour lui. Surtout quand ils ont commencé alors qu'on s'ouvrait juste au rock. Muse est pour ainsi dire intimement lié à mon histoire personnelle.
La simple écoute de cet album me donne une bonne idée de ce que doit ressentir une mère quand elle apprend que ses enfants se droguent.
Je vais être honnète : cet album je suis en train de l‘écouter alors que j'écris cet article, et, franchement, j'en sauverais 2 à 3 titres, et encore, « Knights of Cydonia » c'est juste parce qu'il me fait franchement marrer.
A leurs débuts, Muse passait pour une pâle copie de Radiohead mâtinée de Jeff Buckley. Depuis ils ont réussi à s'émanciper de cette influence. Mais franchement, c'aurait pas été plus mal de la garder plutôt que de s'enfoncer dans ce marasme de superposition de claviers, de guitares vrombissantes et de cordes superflues.
Avant: Une bande de potes vachement Rock n' Roll
Placebo, à leurs débuts, étaient parrainés si l'on ose dire par David Bowie. Et ils finissent par enregistrer leurs albums avec un mec qui a produit Kylie Minogue.

Avant: Sex, vernis à ongles et Rock n' Roll
Et surtout, quand on a 15 ans, on est fier d'écouter une musique qui n'est pas « commerciale » (entendez par là qui ne passe pas en radio). Sur ce coup là j'ai bien l'impression d'avoir été trahi. Faisons plutôt le bilan :
Muse : 4 albums, 3 Live officiels et autant de DVD live, 1 disque de B sides (avec le premier CD live, et encore, qui ne comporte pas les meilleures, comme Host, Pink Ego Box...). Sans compter une moyenne de 5 singles par album (max 14 plages par album), chaque fois regroupés dans un coffret au final. 9 ans de carrière (effective, comptée à partir du 1er album)

2008: Muse réussit là ou U2 et Brain May ont échoué. Organisation d'un séminaire d'astrophysique pour les nuls à Wembley
Placebo : 5 albums (dont « Sleeping with ghosts » édité 3 fois : première réédition avec en bonus « Protect me » version Despentes, puis le même avec en plus un disque de Reprises), 1 Live officiel sorti en DVD aussi, 1 Greatest Hits, 1 disques de B sides - reprises, une moyenne de 4 singles par album (max 12 pistes par album), 1 et bientôt 2 album réédités... spécial 10 ans. 12 ans de carrière (effective, à partir du 1er album). Transformation de « C'est quoi ces drogués ? » en « Tu sais, le groupe avec le petit gars qui parle bien français » auprès de ma mère.

2008: Placebo réussit là où Johnny et Alice Cooper ont échoué et deviennent la nouvelle égérie de Gap pour la saison printemps été.
Alors, O.K., je sais que certains vont me dire que c'est facile d'attaquer ces groupes et que c'est un peu comme tirer sur une ambulance... Il faudra cependant qu'ils sachent que taper cet article me coûte beaucoup. Ce n'est pas que je renie ces groupes que j'ai adoré (écouter les deux premiers albums de chacun reste un plaisir), c'est juste que... C'est douloureux de voir que « Copain d'avant » n'existe pas pour le Rock n' Roll. Jamais Muse ne m'enverra un mail pour me dire qu'ils sont en concert pas loin de chez moi ou qu'ils viennent de se marier même si je m'en fous...
Comme ces amis avec lesquels on s'est perdu de vue alors qu'on s'était promis de s'écrire... J'ai perdu le lien avec ces groupes. Nos chemins se sont séparés. Tout ce qu'il me reste ce sont de bons souvenirs et une forme de reconnaissance.
Parce que c'est facile de critiquer tous ces groupes entre deux eaux, ces groupes de Rock qui n'en sont pas forcément, et qui virent de plus en plus radiomical. Mais il en faut, pour espérer qu'en les écoutant de nouvelles générations de Rock - addicts apparaissent... Personnellement j'en serais pas là sans Muse, Placebo, Offspring et d'autres que je n'oserai citer, ou que j'ai tout simplement oubliés.
Alors oui, disons le, n'ayons pas peur.... Black Holes & Revelations ou Sleeping with Ghosts, c'est de la merde. Mais si on arrive un peu à être indulgent avec c'est que... C'est un peu comme les enfants des amis on arrive jamais à dire clairement qu'ils sont moches.
Cet article, comme je viens de le montrer, ne peut pas être un Top of The Flops « pur »... C'est juste que ca fait encore plus mal quand ce sont nos amis qui nous trahissent. Et que ces albums rentrent donc au Panthéon des grosses déceptions musicales personnelles.
Allez, oublions tout ça, il suffit d'en rire... Rions donc !
Pour cela : Knights Of Cydonia, évidement... Remarquez que c'est le moment pour Matt Bellamy de monter sa secte, vu comme le public est à fond dedans...
Et « Protect me from what I want », traduction de Virginie Despentes, qui prouve que parfois, c'est mieux quand on comprend pas les paroles !! Remarquez également que Brian Molko, autrefois considéré comme un potentiel successeur de David Bowie, a adopté la dégaine de Freddie Mercury maintenant... on attend avec impatience sa reprise de "Under Pressure" en duo avec lui - même.
PS: Je me doute que beaucoup de vous ont déjà écrit sur ces groupes, mais honnêtement j'ai un peu la flemme de mettre tous les liens... Je vous invite à les poster en commentaires.
Cordialement,
Guic.